Éditer Benjamin Constant

L’implication de l’Université de Liège dans la publication des Œuvres complètes de Benjamin Constant (OCBC) est aussi ancienne que le projet lui-même. C’est en 1980, à l’issue de la réunion qui s’est tenue cette année-là, du 15 au 18 juillet, au château de Coppet, aux bords du Léman, sous les intitulés de « Deuxième Congrès de Lausanne à l’occasion du 150e anniversaire de la mort de Benjamin Constant » et de « Troisième Colloque de Coppet », qu’est née l’idée de mettre l’entreprise en chantier.

D’emblée, un « Comité provisoire » a été constitué, à l’initiative de Pierre Cordey, président de l’Association Benjamin Constant nouvellement reconstituée. Ce Comité fut lui-même placé sous la présidence de Maître Claude Reymond, avocat lausannois et professeur aux universités de Lausanne et de Genève. Paul Delbouille, qui avait participé en 1968 au précédent congrès de Lausanne ainsi qu’au deuxième colloque de Coppet en 1977, a été invité à cette réunion fondatrice. Comme il avait entretemps publié sa thèse consacrée à Adolphe, on lui demanda de vouloir bien faire partie de la petite équipe chargée de réfléchir à l’édition des textes littéraires, alors que d’autres constantiens se pencheraient sur les innombrables écrits politiques, sur les travaux relatifs à la religion et sur la « correspondance générale », expression par laquelle on désignait l’ensemble non seulement des lettres écrites par Constant, mais encore des lettres qu’il a reçues, dans la mesure, évidemment, où elles avaient été retrouvées. L’édition proprement dite, qui comporterait, selon les estimations de départ, une cinquantaine de volumes, supposait, bien entendu, une large collaboration internationale entre spécialistes des divers aspects de l’œuvre de Constant.

A l’issue de longs et minutieux travaux préparatoires, portant notamment sur le repérage des écrits à reproduire, dont beaucoup étaient des inédits, la structure du « Comité provisoire » se trouva modifiée en 1986, deux organes étant alors installés : un « Conseil scientifique », chargé de définir les grandes orientations de l’entreprise et un « Comité directeur », chargé de préparer sa mise en route.

C’est à la présidence de ce Comité directeur que Paul Delbouille fut alors appelé, avec pour premières tâches de trouver un éditeur commercial puis de mettre au point des « instructions aux collaborateurs ».

Les OCBC, dont le siège est à Lausanne, ont fait appel, année après année, à des collaborateurs plus nombreux et plus divers, appartenant aussi bien à la Suisse, à l’Allemagne, à l’Angleterre, à l’Espagne, à l’Italie et aux États-Unis qu’à la Belgique.

Pour nous en tenir à l’Université de Liège, on notera simplement qu’à celui de Paul Delbouille qui, tout en assumant toujours la présidence du Comité, participe activement à la publication de nombre de volumes, sont venus s’ajouter plusieurs noms : dans la série Œuvres, ceux de Françoise Tilkin, de Bruno Demoulin, de Francis Balace, de Catherine Lanneau ; du côté de la Correspondance, ceux d’Eckart Pastor et du regretté Robert Leroy. Ces deux derniers figurent au sommaire des volumes où se trouvent les lettres écrites en allemand par la seconde épouse de Constant, née Charlotte von Hardenberg. Ces lettres posaient un problème particulier dans la mesure où elles ne devaient pas seulement être traduites, mais préalablement transcrites, de l’écriture gothique que pratiquait Charlotte, aux caractères romains qu’on lit aujourd’hui. Or nous avions à Liège une équipe de deux amis qui collaboraient comme à plaisir, l’un, Pastor, lisant couramment le gothique manuscrit et l’autre, Leroy, étant un traducteur de premier ordre.

L’entreprise des OCBC, qui se poursuit inlassablement, compte aujourd’hui treize tomes faits de dix-huit volumes pour la série « Œuvres », dont la direction est assurée par Kurt Kloocke, de l’Université de Tübingen ; et huit tomes pour la série « Correspondance générale », dirigée par C. P. Courtney, de l’Université de Cambridge. On peut considérer qu’ainsi la moitié du chemin prévu a été parcourue, et la manière dont le travail est très généralement apprécié par la critique est des plus positives.

La participation active de l’Université de Liège à une édition de cette ampleur, avec les multiples difficultés qu’elle comporte et la reconnaissance internationale dont elle jouit, est un atout dont le Groupe d’études se doit de tirer le meilleur profit.

Avoir l’occasion de familiariser les jeunes chercheurs et les étudiants avec les aléas d’une entreprise qui se trouve au carrefour de l’histoire et de la philologie est une chance qu’on s’en voudrait de ne pas saisir. D’un côté, il s’agit d’écrits qui concernent l’une des pages les plus riches de l’itinéraire politique et militaire de diverses nations européennes. De l’autre, il s’agit des opérations diverses qu’impose l’édition d’écrits philosophiques, littéraires, historiques et politiques différemment reproduits ou restés en manuscrits et quelquefois étrangement retravaillés dans des contextes à reconstituer et à comprendre. En aucune manière on n’a affaire à des exercices imaginés comme tels, mais au contraire à des réalités vécues, auxquelles il faut se colleter pour comprendre mieux tout à la fois un homme hors du commun ainsi qu’une société et une époque complexes où ont été jetées les bases de l’Europe moderne.

Les Œuvres complètes de Benjamin Constant (1767-1830)

Comité de patronage (appellation nouvelle du Conseil scientifique)

Membre d’honneur : Roland MORTIER.

Membres : André CABANIS, Maurice DÈCHERY, Michel DELON, Françoise FORNEROD, Doris JAKUBEC, François JEQUIER, Mario MATUCCI, Martine DE ROUGEMONT, Lionello SOZZI, Arnaud TRIPET et les membres du Comité directeur

Comité Directeur

Président : Paul DELBOUILLE (Université de Liège)

Membres : Léonard BURNAND (Université de Lausanne), Jean-Daniel CANDAUX (Bibliothèque de Genève), C. P. COURTNEY (Université de Cambridge), Lucien JAUME (CNRS, Cevipof, Paris), Kurt KLOOCKE (Université de Tübingen), Giovanni PAOLETTI (Université de Pise), Paul ROWE (Université de Leeds), François ROSSET (Université de Lausanne), Markus WINKLER (Université de Genève), Dennis WOOD (Université de Birmingham)

Secrétaire : Anne HOFMANN (Université de Lausanne)

Volumes parus

Œuvres :

Tome I : Écrits de Jeunesse (1774-1799), Tübingen, Niemeyer, 1998.
Tome II : De la justice politique (1798-1800), Tübingen, Niemeyer, 2 vol., 1998.
Tome III : Écrits littéraires (1800-1813), Tübingen, Niemeyer, 2 vol., 1993.
Tome IV : Discours au Tribunat. De la possibilité d’une constitution républicaine dans un grand pays (1799-1803), Tübingen, Niemeyer, 2005.
Tome V : Principes de politique applicables à tous les gouvernements représentatifs (texte de 1806), Berlin, De Gruyter, 2010.
Tome VI : Journaux intimes (1804-1811), Tübingen, Niemeyer, 2002.
Tome VII : Journal intime (1811-1816), Tübingen, Niemeyer, 2005.
Tome VIII : Florestan – De l’esprit de conquête et de l’usurpation – Réflexions sur les constitutions (1813-1814), Tübingen, Niemeyer, 2 vol., 2005.
Tome IX : Principes de politique et autres écrits politiques (juin 1814-juillet 1815), Tübingen, Niemeyer, 2001.
Tome X : Textes politiques de 1815 à 1817 – Articles du Mercure de France. Annales de la session de 1817 à 1818, Berlin, De Gruyter, 2 vol., 2010.
Tome XI : L’affaire Wilfried Regnault. La Minerve française et autres textes de 1818. Cours à l’Athénée. Cours de politique constitutionnelle. Élections de 1818, Berlin, De Gruyter, 2010.
Tome XIV : Mémoires sur les Cent-Jours, Tübingen, Niemeyer, 1993.
Tome XVIII : De la Religion, tome 2, Tübingen, Niemeyer, 1999.

En relecture et en préparation :

Tome XXXVI : Commentaires sur Filangieri.
Tome XXXIII : Mélanges de littérature et de politique.
Tome XII : Discours à la Chambre des députés (sessions 1819 et 1820).
Tome XIII : Articles de La Minerve et de La Renommée (1819 et 1820).
Tome XV : Brochures et manuscrits (1819 et 1820).
Tome XVII : De la Religion, tome 1.
Tome XVI : Premiers écrits sur la religion – Recherches historiques sur les religions des principaux peuples de l’antiquité (1795-1806).

Correspondance générale :

Tome I : Correspondance générale 1774-1792, Tübingen, Niemeyer, 1993.
Tome II : Correspondance générale 1793-1794, Tübingen, Niemeyer, 1998.
Tome III : Correspondance générale 1795-1799, Tübingen, Niemeyer, 2002.
Tome IV : Correspondance générale 1800-1802, Tübingen, Niemeyer, 2006.
Tome V : Correspondance générale 1803-1805, Tübingen, Niemeyer, 2007.
Tome VI : Correspondance générale 1806-1807, Tübingen, Niemeyer, 2008.
Tome VII : Correspondance générale 1808-1809, Tübingen, Niemeyer, 2009.
Tome VIII : Correspondance générale 1810-1812, Berlin, De Gruyter, 2010.

En relecture et en préparation :

Tome IX : Correspondance générale 1813-1815.
Tome X : Correspondance générale 1816-1818.

N.B. Le changement du nom d’éditeur, en 2010, est dû à la fusion des éditions Max Niemeyer, de Tübingen, et des éditions De Gruyter, de Berlin. Le contrat n’a pas été modifié.