Le site de Garaguso fait partie des grands centres indigènes qui contrôlaient l’intérieur des terres de la Lucanie antique. Il domine la Salandrella, un affluent du Cavone, l’un des cinq cours d’eau navigables qui traversent la Basilicate pour se jeter dans le Golfe de Tarente en passant par le territoire de la cité grecque de Métaponte. Cette position stratégique a permis à Garaguso d’occuper une place de choix au sein des relations avec les Grecs et de connaître par conséquent une degré d’hellénisation assez élevé. De plus, Garaguso abritait l’un des sanctuaires indigènes les plus importants de Lucanie, comme a pu en attester la recherche archéologique qui s’y est développée depuis le début du siècle dernier.

En effet, en 1916, l’archéologue V. DI CICCO y mit au jour, sur le site de la « Vigna Manzi », les vestiges d’un édifice qui contenait encore une partie de son mobilier, ainsi que différentes offrandes, dont la célèbre « Dea di Garaguso », un groupe sculptural en marbre de Paros constitué d’une statuette de divinité féminine trônant accompagnée d’un modèle réduit de temple (480-460 av. J.-C.). Cette découverte exceptionnelle ramenait à la lumière un site de tout premier ordre pour l’étude des relations qu’entretenaient – en ces territoires – les populations indigènes et grecques. En dépit de cet événement remarquable, le site de la « Vigna Manzi » n’a par la suite fait l’objet que de modestes investigations de terrain : par E. GALLI en 1933, puis par J.-P. MOREL en 1969 et 1970 – sans grand résultat. Plus récemment, durant l’été 2008, un sondage stratigraphique y a été ouvert, sous l’autorité du Prof. J.-M. MORET (Université Lyon 2), révélant un réseau de structures monumentales.

La « Vigna Manzi » offre une remarquable opportunité archéologique en présentant un site de grande ampleur, sur un terrain non construit – donc très peu perturbé si ce n’est en surface – renseignant une séquence stratigraphique de près de six mètres de profondeur, présentant différentes niveaux d’occupation en place. Ces structures mettent en évidence la présence d’un monumental dispositif de terrassement mis en œuvre durant l’Antiquité. Ils témoignent sans ambages de l’importance de ce site archéologique.

A l’occasion de deux campagnes de prospection en 2010 et 2011, l’étude de la « Vigna Manzi » a été confiée au Prof. Th. MORARD et du Service d’Histoire de l’Art et Archéologie de l’Antiquité gréco-romaine de l’Université de Liège. En octobre 2016, une campagne de documentation a été menée dans les archives et les dépôts du musée archéologique Domenico Ridola de Matera, afin d’étudier le matériel  issu de la fouille de 2008 et de préparer la publication des résultats de cette entreprise, sous la forme d’un article intitulé « La Vigna Manzi a Garaguso (Basilicate). Vecchi scavi e ricerche in corso e prospettive di studio di un importante sito indigeno » dans la revue SIRIS (sous presse).

Dans cet élan, au cours de l’été 2019, le Service d’Histoire de l’art et Archéologie de l’Antiquité gréco-romaine de l’Université de Liège a mené une première campagne de fouilles sur le site de la « Vigna Manzi » à Garaguso. Soutenu par un financement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, cette entreprise archéologique a permis de ramener à la lumière, sous près de 3 mètres de stratigraphie, des structures monumentales accompagnées d’un riche matériel céramique (daté pour l’essentiel des Ve et IVe s. av. J.-C.) appartenant probablement au sanctuaire lucanien recherché. Cette campagne de fouilles et de documentation marque la première étape d’un projet ambitieux – intégrant des prospections géophysiques (GPR) – qu’entend développer le SHAARAGR, en étroite collaboration avec la Soprintendenza Archeologia della Basilicata et la Scuola di Specializzazione in Beni Culturali di Matera de l’Università degli Studi della Basilicata.

Ce projet de recherche a provisoirement été interrompu en raison de la pandémie du Covid-19. Lorsque les conditions sanitaires le permettront, une campagne d’étude de la céramique issue de la campagne GARA19 sera organisée dans les dépôts du musée archéologique Domenico Ridola de Matera. La reprise des fouilles est d’ores et déjà programmée pour l’été 2022.

ÉQUIPE

Thomas MORARD et Jean-Marc MORET, Lola TYDGADT, Graham CUVELIER, Tommy DESWYSEN et Lucie MOTTA