Auguste Bricteux (1873 – 1937)

Auguste Bricteux naquit à Flémalle-Haute en 1873. Après avoir terminé ses humanités à l’Athénée de Liège, il s’inscrivit à la Section de Philologie germanique de l’Université de Liège. Au bout d’un an, il abandonna cette première orientation pour s’inscrire à la Section de philologie classique, dans laquelle il voyait la formation nécessaire à des études d’orientalisme.
 V. Chauvin lui apprit l’arabe et l’hébreu, le P. Steenackers le chinois, E. Orsolle le persan, qui devint sa spécialité. Il succéda à son maître E. Orsolle, après le départ de celui-ci, en 1900. En 1904, il fut chargé du cours de turc, et après la mort de son maître V. Chauvin, des cours d’hébreu et d’arabe. Après la création de l’Institut Supérieur d’Histoire et des Langues Orientales, il fut chargé d’un cours d’«histoire de l’art musulman». 
Il avait fait de nombreux voyages en Orient : Turquie, Caucase et surtout la Perse. Il avait aussi participé aux 17e et 18e Congrès des Orientalistes (Oxford, 1928 ; Leyde, 1931).

Jacques Duchesne-Guillemin, qui fut son élève et qui lui succéda dans la chaire de persan, a tracé de l’homme et du savant un très beau portrait, dont nous citons les extraits suivants : 
«L’immense promenade que fut sa vie à travers les littératures du monde entier, il voulut la faire autant que possible dans les textes originaux, dont presque toujours la traduction, en appliquant des mots de chez nous et d’aujourd’hui – si bien choisis soient-ils – brise le charme. Aussi finit-il par savoir la plupart des langues qui ont eu une littérature, celles de l’Europe, du portugais au russe, y compris le finnois et le basque, avec une prédilection pour l’anglais, celles d’Asie, parmi lesquelles, s’il
 oublia le chinois et s’il n’a jamais communiqué sa connaissance du géorgien, il cultivait et enseignait l’hébreu, l’arabe, le turc, le persan, le pehlevi.»

«Une grande ouverture d’esprit, un pouvoir d’adaptation parfaite lui permettaient d’apprécier les plus humbles mérites d’une œuvre, et la musique, qu’il pratiquait beaucoup, avivait encore cette sensibilité d’artiste. Son goût pour les langues et son goût pour la musique n’étaient peut-être, après tout, que les deux formes d’une même passion : lorsque, s’étant assimilé par une gradation régulière de thèmes ou de gammes un mécanisme linguistique ou la technique d’un instrument, il déchiffrait quelque œuvre littéraire ou musicale, sans doute le sentiment de résoudre des difficultés sans cesse renaissantes avec toujours plus d’aisance, de rapidité et de finesse, – d’approcher toujours davantage de la traduction ou de l’exécution parfaites – avait-il dans les deux cas une seule et même saveur pour ce virtuose des langues… » 
«L’érudition, fût-elle linguistique, l’intéressait moins pour elle-même que comme l’indispensable servante de l’intelligence des textes. C’est ainsi que, peu soucieux d’accroître encore la somme des doctes publications de son temps et mettant la beauté par-dessus tout, il s’est proposé uniquement, dans la plupart de ses livres, de faire connaître et goûter des œuvres.» 
«Sa gaieté bien connue, son indomptable rire recouvraient cependant une amertume profonde, qui lui avait à la longue bridé douloureusement la bouche et que trahissaient par instants des silences rêveurs : il avait trop d’imagination, cette faculté – moins commune qu’on ne croit – de se représenter la réalité absente pour méconnaître l’immense misère des hommes. Sa piété farouche, mais infiniment révérencieuse, eût également surpris tous ceux qui, se divisant en camps adverses, veulent abaisser certains hommes au niveau de distinctions qui ne valent que pour eux-mêmes. »

Bibliographie

1. Livres

  • Au pays du Lion et du Soleil, Bruxelles, 1908, 272 p.

  • Contes persans, Liège, 1910, 528 p.

  • Djâmî, Salaman et Absal, traduit pour la première fois du persan en français, avec une introduction et des notes, Paris, 1927, 281 p.

  • Les comédies de Malkom Khan, traduites pour la première fois du persan en français avec une introduction, des notes et un glossaire, Liège, 1933, 128 p.

  • Mirza, Dja ‘far Qaradjadaghî, l’Avare, comédie persane publiée pour la première fois avec une introduction, notes et glossaire, Liège, 1934, 186 p.

  • Rostem et Sohrâb, Bibliothèque de la Faculté de Philosophie et Lettres, Liège, 1937, 91 p.

2. Articles

  • «Histoire des Trois Jouvenceaux qui voyagent en compagnie d’un Vieillard, traduite du persan», dans Le Muséon, 1905.

  • «Histoire de la Simorergh, traduite du persan», dans Le Muséon, 1905.

  • «Les manuscrits persans de la Bibliothèque de l’Université de Liège», dans Mélanges Godefroid Kurth, t. II, Liège, 1908.

  • «Le châtiment populaire de l’infidélité populaire, étude de folklore», dans Revue anthropologique, 1922.

  • «Pasquinade sur la ville de Tébrîz par Maître Lissânî de Chiraz, éditée et traduite pour la première fois avec une introduction et des notes», dans Mélanges de philologie orientale, publiés à l’occasion du Xe anniversaire de la création de l’Institut Supérieur d’Histoire et de Littératures Orientales de l’Université de Liège, Liège-Louvain, 1932, p. 1-56.

  • «Firdousî et le Chah Nameh, suivi de Les Amours de Zâl et de Roudabeh, traduction en vers blancs dans le mètre de l’original», dans Le Flambeau, déc. 1934 et janv. 1935, et, à part, Bruxelles, 1935, 40 p.

  • «Le millénaire de Firdousî, suivi de L’épisode de Roustem et Sohrab, traduit en vers blancs dans le mètre de l’original», dans Bulletin de l’Association des Amis de l’Université de Liège, avril 1935.

  • «La place de Firdousî dans la littérature persane», dans Journal des Poètes, avril 1935.

Sources biographiques et bibliographiques

  • Liber Memorialis. L’Université de Liège de 1867 à 1935. Notices biographiques, t. I, Faculté de Philosophie et Lettres. Faculté de Droit, Liège, Rectorat de l’Université, 1936, p. 508-510.

  • Liber Memorialis. L’Université de Liège de 1936 à 1966. Notices historiques et biographiques, t. II, Notices biographiques, Liège, Rectorat de l’Université, 1967, p. 76- 80 (par Jacques Duchesne-Guillemin).