L’héritage littéraire d’Antoine Galland (1646-1715) : édition et étude d’écrits inédits
Notre intérêt pour Antoine Galland (1646-1715), célèbre traducteur des Mille et une nuits , remonte à la découverte faite par F. Bauden du récit inédit et autographe de son voyage à Smyrne en 1678 (Smyrne ancienne et moderne). Après la publication de l’édition princeps de ce récit (Le Voyage à Smyrne, 2000), cet intérêt n’a été que grandissant pour le personnage et ses travaux. Souvent considéré comme un simple traducteur, il apparaît que Galland était avant tout un savant humaniste, digne représentant de l’orientalisme du XVIIe s., à l’aise tant dans les sujets touchant à l’Antiquité que dans ceux ressortissant à la culture orientale. Parmi les multiples manuscrits qu’il a légués à la postérité et qui sont aujourd’hui majoritairement conservés à la BnF à Paris figurent de nombreux textes personnels qui méritent d’être édités et étudiés pour avoir une meilleure connaissance de la personnalité et des travaux de Galland mais aussi des environnements dans lesquels il fut appelé à évoluer.
Le Journal de Galland, véritable diaire rédigé toute sa vie durant, n’est plus aujourd’hui conservé que pour les années 1672-1673 (dit Voyage à Constantinople) et 1708-1715. Celui de cette dernière période, qui correspond aux dernières années de sa vie, restait pour une grande part inédit est indubitablement une des plus riches sur le plan professionnel puisqu’elle voit A. Galland accéder à la plus haute fonction qu’il pouvait espérer jamais atteindre: la chaire de langue arabe au Collège royal (1709). Le journal de ces années constitue donc une source de première importance tant pour retracer les dernières années de la vie de ce savant digne représentant de la République des Lettres, qui nous fait part consciencieusement du contenu des séances bi-hebdomadaires de la vénérable Académie royale des inscriptions, que pour reconstruire son réseau de correspondants, d’amis, de collègues dans ce Siècle des Lumières qui est en train de se dessiner. Lancé en 2006, le projet, mené de concert par Frédéric Bauden et Richard Waller (Université de Liverpool), vise à publier l’intégralité du Journal correspondant aux années 1708-1715 en cinq volumes (le vol. I, contenant les années 1708-1709, a paru au début de l’année 2011 et le vol. II, contenant les années 1710-1711, à la fin de 2012 ; les volumes III, contenant les années 1712-1713, et IV, contenant les années 1714-1715, sont en voie de publication et le volume V, réservé aux index et à la bibliographie générale est en préparation). Le projet, qui a été financé par l’Université de Liège, le Arts & Humanities Research Council et la British Academy, sera clôturé en février 2015 pour le tricentenaire de la mort de Galland avec l’organisation d’un colloque international.
Publications relatives au projet
Tout au long de sa longue carrière, Galland entretint une correspondance nourrie avec de multiples personnes appartenant à des couches diverses de la société française en particulier, et européenne en général. Érudits, protecteurs, parents, fonctionnaires, voyageurs, tous réclamaient des nouvelles à la fois de l’antiquaire, du numismate, de l’épigraphiste, de l’orientaliste qu’était Galland. Cette correspondance est aujourd’hui dispersée dans diverses institutions européennes. Le projet d’édition de la correspondance de Galland sera fortement tributaire du travail qu’avait accompli M. Abdel-Halim en 1964 dans le cadre de sa thèse annexe. Il ira toutefois beaucoup plus loin puisqu’il visera à éditer l’intégralité des lettres conservées et à en annoter le texte de manière à le rendre intelligible.
Des trois séjours que fit Galland en Orient, le dernier fut le plus long puisqu’il s’étendit entre 1679 et 1688. Au cours de celui-ci, il fut, tour à tour, commissionné par la Compagnie du Levant pour trouver des manuscrits et des monnaies qui pussent satisfaire l’appétit de Colbert (1679-1680), engagé par l’ambassadeur de Guilleragues pour diverses tâches (1680-1685), et enfin à nouveau engagé, cette fois par Louvois, comme antiquaire chargé d’acquérir des monnaies antiques devant venir enrichir les collections royales (1685-1688). De ce séjour, seules les deux premières années nous sont connues dans le détail grâce au journal que Galland tint et qui est conservé dans les collections de la Bayerische Staatsbibliothek à Munich. Le projet vise à l’édition critique de ce manuscrit qui a été revu et corrigé par aux moins deux autres mains au XVIIIe s.