Le fils de Neandertal ou le secret de nos origines | 04/2017
Samedi 01/04/2017 | RTBF 17:34 | ARTE 20:50
Réalisation : Jacques Mitsch (52′, 2017)
À revoir sur ARTE
Écrit par : Jacques Mitsch, Coralie Miller et Nicolas Teyssandier
Coproduction Gedeon Programmes et Arte G.E.I.E.
Avec la participation de la Région Occitanie, de la RTBF et du CNC
Homo Sapiens, l’homme moderne, est-il la seule espèce humaine sur Terre ? L’étape ultime de notre évolution ? C’est ce que l’on croyait… jusqu’à la découverte d’un étrange corps fossilisé vieux de plusieurs milliers d’années qui remet en question tout ce que nous pensions savoir et qui nous rappelle combien les connaissances sur nos origines peuvent à tout moment être ébranlées.
La sépulture est porteuse d’une révolution, qui nous renvoie aux sources du métissage primitif. Depuis 2006, nous savons que Sapiens et Neandertal ont mélangé leurs gènes et que ces épisodes ont laissé des traces jusqu’à aujourd’hui, puisqu’une partie de l’humanité porte des gènes hérités de Neandertal dans son génome, entre 1 et 4 %. La présence de ces gènes archaïques permet à certaines caractéristiques physiques ou pathologiques de se développer. Ce métissage ancien influence donc encore aujourd’hui notre santé, et nos comportements.
Neandertal est notre cousin, voilà peut-être pourquoi, depuis toujours, il fascine l’homme moderne. Son image se modifie au fil des découvertes archéologiques. Il n’est pas inférieur à nous, juste différent.
Pendant des mois, préhistoriens, paléoanthropologues et généticiens ont travaillé d’arrache-pied, pour percer les secrets de la sépulture, la plus grande découverte archéologique du 21ème siècle. Une véritable bombe scientifique qui va révéler un des grands mystères de notre passé et apporter de nouvelles réponses sur ce que nous sommes aujourd’hui.
Un grand voyage vous attend sur les traces du plus incroyable de nos ancêtres.
Science et Fiction
L’occasion du premier avril, offerte par la production ARTE, doit être considérée comme une « farce » rabelaisienne, celle où les dogmes habituels peuvent enfin être remis en question, via l’humour, principale voie de réflexion libre. Il s’agit donc de jouer avec des concepts, vaguement connus par tous, entrés dans une conscience collective sans vraiment d’appareil critique, mais fondés sur des déclarations scientifiques chaotiques et lointaines. Souvent ces « vérités » se fondent aussi sur des ressentiments obscurs, telle l’appréhension de l’autre, de la différence. La farce se présente alors sous une forme très opportune, et nous avons cherché à démontrer que de tels fantasmes, en prenant un exemple à connotation anodine et détachée dans un mode d’apparence logique. Toutes ces différences résonnent dans les esprits collectifs tels des raisons de se sentir supérieur, soit en une moderne humanité, soit en une hiérarchie scientifique. Les deux catégories de tolérance se trouvent ici mises en cause par l’humour décalé. Il ne s’agit pas de savoir ce qui pourrait être vrai dans un domaine aussi complexe que la paléogénétique, mais de prendre ses distances par rapport à leurs interprétations. La leçon porte avant tout vers nos collègues désignés comme scientifiques, les faire rire les fera douter. Et le public sera invité à méditer sur les frontières floues, entretenues intentionnellement, entre l’idéologie et la connaissance. Nos théories se différencient en effet bien davantage que l’on ne peut imaginer, et leur élaboration correspond souvent à des vues de l’esprit bien antérieures à leur démonstration empirique. La fiction possède aussi l’énorme avantage de faire vivre une aventure, lorsqu’elle est comme ici, si bien articulée par le génie créateur de Jacques Mitsch ! Ces passages d’une région à l’autre soutenus par une intrigue à rebondissements perpétuels, créent la tension nécessaire, loin des ennuyeux reportages où une seule vérité vous est assenée magistralement et sans imagination, sans nuance, sans passion. Ici, tout est vraisemblable, à chaque étape de l’aventure tendue vers l’interrogation, tout est possible, jusque le métissage, absolument certain, entre des populations brusquement mises en contacts étroits et inédits. Ces jeunes gens ont bien entendu connu des contacts comme partout ailleurs dans des situations analogues.
De telle sorte que l’imagination ne porte ici que sur l’extraordinaire coïncidence lors de la découverte, une chance exceptionnelle, mais non absurde, elle aurait pu réellement se produire ! Notre film n’est pas que de l’amusement, il tient à émouvoir, à faire savoir, à convaincre par la trame romancière, il cherche à faire aimer la découverte. Il touche principalement, car il rejoint toutes les aspirations, le besoin au rêve, à la connaissance, comme Jules Vernes nous l’avait appris, aux limites entre la connaissance patentée, académique, instituée, et le monde rêvé qui fut aux origines de ces institutions, mais si souvent méprisé par la suite. Un cercle vicieux est ainsi désigné : celui de l’académisme par lequel, l’aspiration à la connaissance ; nécessaire à toute vie humaine, se trouve récupérée par les règles instituées, perversion courante et gênante. Car elle tue les rêves au cœur de notre démarche, et elle triche volontiers avec les aspirations du public (« ceci est la science ») et les vocations des médias journalistiques. Il faut retrouver cette fibre créatrice aux sources de toutes connaissances, et que les Institutions souvent combattent en une entreprise délétère. Les réactions face à ce film s’organiseront selon ces axes : frileux derrière le paravent d’une science officielle, ou appel à l’authenticité, celle qui nous a amenés à réaliser notre vocation, mais que les cercles de pouvoir ont émoussée. Voyez dans notre film, une libération intellectuelle, un souffle d’âme, une revanche de la réalité vécue sur la vérité instituée. Car séduire par la fiction met en déroute la stabilité des dogmes transmis, reproduits, assénés sans relâche par les revues réputées, chères et patentées. Notre rêve est aussi celui de la libération des organes commerciaux qui les soutiennent et en tire des bénéfices scandaleux. Toute « vérité scientifique» doit donc y être perpétuellement répétée, codifiée et cautionnée par ces fausses compétences, dominées par des idéologies certainement par innocentes. La fiction offre une révolution, douce et féconde, faire aimer rend créateur et tolérant, ce fut notre objectif ici.
Marcel Otte | 02/04/2017
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